Centre de recherche risques et vulnérabilités (CERREV) de l’Université Caen Normandie
14/04/23
Quelles technologies dans l’agriculture ?
Face au constat de l’apparition d’une multitude d’objets connectés au sein du monde agricole, de nouveaux acteurs et de nouvelles alliances, d’une polarisation instrumentalisée toujours plus forte entre agricultures occidentales et du sud, agriculture intensive et extensive, productiviste et agroécologique, pro technos et anti technos, high-tech et low tech, … Comment se réapproprier et débattre les choix et les orientations technologiques dans le monde agricole ?
L’avenir de la production alimentaire en Normandie concerne les entrepreneurs, les producteurs, les citoyens, les institutionnels. À l’Etang Salé (La Réunion) Réunion, à Montréal (Québec) et maintenant à Caen (Normandie). Cette journée d’ateliers vous propose de mettre en discussion les pratiques agroécologiques et les outils numériques, lors d’une journée “laboratoire vivant”.
En présence de chercheurs, d’institutionnels et d’ingénieurs, vous allez pouvoir, dans la matinée, imaginer ensemble l’agriculture de demain, et dans l’après-midi, manipuler des technologies agricoles numériques “alternatives”.
Au terme de l’atelier les participants recevront un rapport et pourront manifester leur envie dans la création d’une communauté d’intérêts, autour des technologies dans l’agriculture normande.
INTERVENANT·E·S :
- Allison-Marie Loconto
- Malvina Artheau
- Lionel Larqué
- Sarah Migault
Sarah Migault entame la présentation de la journée
Présentation de l’atelier
46 personnes dont les intervenants étaient présents lors de cette journée pour réfléchir ensemble au monde agricole normand en 2050 et à ses technologies.Allison-Marie Loconto (Inrae) à introduit la journée en donnant des exemples d’initiatives en agroécologie et de labellisation, tandis que Lionel Larqué nous a parlé des enjeux autour des technologies qui ne sont pas neutres. Sarah Migault a présenté l’objet de sa recherche sur la territorialisation des choix technologiques.
Lionel Larqué présente les grands enjeux du numérique
Mini-conférences
Après un jeu pour permettre aux participant·e·s de faire connaissance et de briser la glace, nous entrons dans le coeur du sujet avec deux mini-conférences “Les grands enjeux de l’agroéologie” par Allisson-Marie Loconto et “les grands enjeux du numériques” par Lionel Larquet suivies d’une discussion nourrie avec les participant·e·s.Les participant·e·s se projettent dans le futur avec trois ateliers menés en parallèle : l’atelier contrefactuel, les futurs souhaitables et le chemin vers l’utopie.
Les participant·e·s structurent leurs idées sur paper-board pour que Caroline Tostain puisse en faire la synthèse en dessin
Atelier contrefactuel
“Et si les téléphones n’étaient pas devenus des smartphones”. Animé par Ugo Denis, Frédéric Villain et croqué par Caroline Tostain.
Un groupe se met d’accord sur les interaction sociales de son exploitation en 2050
Les futurs souhaitables
“À quoi devrait ressembler une exploitation agricole en 2050 ?”. Animé par Malvina Artheau accompagnée par Ké-Lynn Houssin pour la facilitation graphique
Atelier agriculture urbaine en 2050 en cours
Le chemin vers l’utopie
Imaginons que l’agriculture urbaine normande en 2050 fait figure de modèle, racontez-moi pourquoi et comment vous en êtes arrivé là. Les étapes d’une réussite sous forme de reportage. Animé par Hugo De-Verges d’Astredhor
Frédéric Vilain présente les technologies Aliaterra
S'approprier les technologies
Après un déjeuner convivial pris toustes ensemble, c’est reparti pour approfondir les idées ayant émergées durant la matinée : On ouvre, on décortique, on explique les technologies, l’objectif est de questionner les modes d’habiter, les milieux de vie et les modes vernaculaires.Il s’agit d’aller dans le sens d’un d’un rapport habitant·e·s-lieu “durable”, c’est à dire acceptable et d’un point de vue social, et d’un point de vue écologique (Mathieu 2014). Les participant·e·s bravent le froid pour découvrir les technologies Aliaterra installées dans le Farmabot du Dôme et présentées par Frédéric Vilain.
Pas facile d’organiser et de synthétiser les réponses à la question “Que faire pour avoir un environnement en mauvaise santé”
Entretien croisé
Pour inviter les participant·e·s à exprimer leur perceptions et creuser leur pensée, nous les soumettons à un entretien croisé. Chaqu’un·e est invité à répondre trois fois à trois questions sur le principe de l’anti-problème :
- Comment faire une mauvaise technologie ?
- Que faire pour avoir un environnement en mauvaise santé ?
- Qu’est-ce qu'une mauvaise agriculture ?
Puis les participant·e·s répartis en 4 sous-groupes analysent les réponses collectives pour en réaliser la synthèse.
Un groupe se met d’accord sur les interaction sociales de son exploitation en 2050
Loto de la météo
La journée se termine par le tirage au sort qui désigne, parmi les agriculteur·ice·s présente·e·s, celui ou celle qui remportera une station météo. C’est un étudiant qui remporte le prix, un beau cadeau pour son père agriculteur !
LE FUTUR D’UNE FERME SANS SMART-PHONE
Comment faire pour avoir de l’eau pour les cultures tout en ne disposant pas de technologies aussi poussées dans mon tel.Piratage d’eau, réservoir d’eau, sourcier… ont été évoqués, tout en imaginant plusieurs scénarios sur des temporalité différentes de la journée d’un.e agriculteur.trice qui doit remédier au problème d’arroser ses cultures et d’avoir la météo.
Solution court termiste :
La volonté d’avoir une météo très localisée et des connaissances de son sol reste très importante, d’où des pistes comme l’installation de station météo, carottage, pistes techniques comme l’arrosage, des cultures plus résistantes. Mais le problème demeure, le manque d’eau, alors comment faire ? Conseil de village, autour de la table des agriculteurs mais pas que : industriels, collectivités. Qu’est-ce que chacun à comme ressource en eau et comme besoin en eau ? L’objectif est de se mettre d’accord et de planifier, d’en donner à son voisin, entraide, troc à court terme, tout en devant remédier au problème logistique comme le transport avec une citerne à eau. Il faudra ensuite rendre des services ou payer…
Solutions moyen termes :
Repenser ses pratiques comme l’agroécologie : paillage, adaptation des cultures, changer les variétés, formation, diversification, irrigation au goutte à goutte pour amener l’eau au bon endroit.
Puis en prenant de la hauteur, la désalinisation de l’eau a été évoquée pour avoir des ressources supplémentaires, tout comme d’en référer aux autorités publiques pour avoir plus d’aides, restreindre les usages comme les piscines ou laver les voitures. Donc il faut des règles, des gestionnaires… Il faut des arbitres de l’eau pour siffler les priorités de chacun.
Finalement, quand on coupe le téléphone, qu’on a plus l’instantané les informations deviennent très locales, avec plus de consultation, plus d’humain pour discuter pour vrai, des vrais problèmes.
→ Petit territoire permet dans ce scénario une rapidité d'action par les humains.
NOTRE FERME EN 2050
Le groupe a imaginé et s’est mis d’accord sur une ferme de polyculture/élevage, avec du maraîchage. Dans une logique d’autonomie locale, il est également prévu de transformer certains produits et de les vendre sur place. Pour une meilleure gestion de la ressource en eau, la culture de maïs et de soja a été abandonnée et la surface de prairies (temporaires en rotation de cultures et permanentes) augmentée, un récupérateur d’eau de pluie domestique a été adossé à l’exploitation et une autre, de dimensions plus importantes a été associé aux champs.La question de l’indépendance énergétique a également été traitée avec l‘installation de panneaux solaires sur les bâtiments de l’exploitation. Il a été également question d’éoliennes et de méthaniseurs, mais le temps a manqué pour que le groupe arrive à un consensus sur ces questions.
Le groupe a également décidé de restaurer les haies et de s’engager sur la voie de l’agroforesterie (zone de maraîchage, haies, champs) en s’équipant progressivement de machines agricoles moins volumineuses. La réussite du projet dépend d’une coopération réussie avec d’autres exploitations voisines : les ateliers de transformation, l’augmentation de surface des prairies et les récupérateurs d’eau de pluie peuvent être partagés.
LES ÉTAPES D’UNE RÉUSSITE
Après une réflexion sur ce que devrait être la ferme urbaine normande de 2050 les participant.es se sont prêté.es au jeu d’une restitution sous format journalistique.Bienvenue dans une ville sans voiture, qui cultive la diversité variétale, des systèmes de production comme le maraichage sur toits et façades ou encore la culture d’insectes, disposant de mini méthaniseur dispersé un peu partout en ville. Le tout aidé avec l’agriculture dite de précision.
Pour voir la vidéo :
COMMENT-FAIRE UNE MAUVAISE TECHNOLOGIE ?
Liste des réponses des participant·e·s classées par nombre d’occurence, et en reflet, liste de ce qu’il convient de faire pour créer une “bonne” technologie
- En détruisant l’environnement (20)
- En créant des technologies qui ne servent à rien (15)
- En n’impliquant pas l’humain (13)
- En ne prenant pas en compte les besoins des usager·ère·s (6)
- En laissant seul·e·s juges les personnes qui développent les technologies (4)
- En créant avec de mauvaises intentions (4)
- En créant des technologies inaccessibles (4)
- Sans faire de tests (3)
- En créant des technologies qui ne sont pas viables économiquement (2)
- Il n’y a pas de mauvaises technologies (4)
QUE FAIRE POUR AVOIR UN ENVIRONNEMENT EN MAUVAISE SANTÉ
Mauvaises pratiques :
- Ignorer l'environnement et négliger les besoins de chaque espèce
- Artificialisation
- Modèles intensifs
- Pollution
- Destruction
- Manque d’ambition réglementaire
Choix économiques
- Surproduction - Modèle productiviste
- Soumission à d’autres secteurs ayant d’autres enjeux (marketing, finances, scientisme …)
- Dévalorisation économique du recyclage
Comportements
- Négliger les conséquences de ses actes
- Surconsommation
- Oublier la poésie, le sens, le coeur, le beau (contemplation)
- Suivre des gourous sans réfléchir
QU’EST-CE QU’UNE MAUVAISE AGRICULTURE
- Agriculture intensive, productiviste,
- Homogène et standardisée
- Rentabilité comme unique indicateur
- Non réflexive, l’autonomie, remise en question, sans humain, manque de vie des sols et humaines
- Qui n’est pas locale, qui ne prend pas en compte son territoire, terroir, urgence climatique
- Souffrances au travail
- Autonomie économique, des pratiques
- Bien être animal
- les intrants chimiques
L’agriculture biologique à initié un débat, voici quelques unes des réponses :
- permet pas de nourrir la planète
- remets en cause leurs pratiques
- des filières bios qui poussent les agriculteurs à faire de la culture bio intensive : comme les poulaillers géants qui font 9000 poules, reproduction d’un modèle intensif au bio
- c’est le cahier des charges bio en faite : a force de vouloir réglementer sans se poser la question macro économique et écologique cela ne va pas
- plus le label je pense, comme étant le problème en tant que mauvaise agriculture
- il y a un malentendu, car on pense que l' agri bio c’est bon alors que le principe c’est pas d’intrant chimique mais naturel mais la nature produit aussi des choses mauvaises, comme le cuivre. Ce parallèle du coup est pas bon. Et il y a un mouvement que j’ai du mal à comprendre, le mouvement actuel de l’agriculture biologique contre l’agriculture HVE, sous prétexte que c’est pas bien, de mon point de vue de citoyen toutes les démarches qui visent à améliorer les pratiques est bien.
- Le HVE fait concurrence au bio sur le marché, alors que par ailleurs on nous dit qu’il ne faut pas regarder l'économie…