CREM
Université de Caen Normandie
Les modes de scrutin mis en œuvre dans nos sociétés sont relativement restreints au regard de la diversité des méthodes existantes. De plus, ils ne permettent pas toujours aux électeurs d’exprimer finement leurs choix. Cet atelier propose de découvrir et de tester des outils de vote à utiliser pour organiser un collectif, choisir des films entre ami·e·s ou répartir un budget participatif.
À l’aide d’un scénario ludique et en s’appuyant sur l’outil Whale, accompagné·e·s par une équipe de chercheurs et chercheuses en économie du choix social et informatique, les participant·e·s pourront découvrir et tester plusieurs systèmes de vote, puis réfléchir à la meilleure façon d’allouer des budgets participatifs et finalement proposer des éléments de réflexion, à destination d’associations ou de collectivités territoriales qui sont ou seront confrontées à ce type de décision.
Intervenant·e·s :
- Vincent Merlin – Directeur de Recherche CNRS
- Isabelle Lebon – Professeur Economie CREM
- Théo Delemazure, Doctorant au LAMSADE, Paris Dauphine (Jérôme Lang – Directeur recherche CNRS au LAMSADE)
- Marin Gohard, Doctorant au CREM
- Théo Lesenechal et Arthur Le Coz, Vice-Présidents étudiants de l’Université de Caen Normandie
- Arnaud Rioual - Chef de projets au Dôme
Présentation - Quelles modalités de vote et de scrutin utiliser pour faire de réels choix collectifs ?
Les modes de scrutin mis en œuvre dans nos sociétés sont relativement restreints au regard de la diversité des méthodes existantes.
De plus, ils ne permettent pas toujours aux électeurs d’exprimer finement leurs choix.
Lors de ces deux ateliers, Vincent Merlin et Isabelle Lebon du Centre de Recherche en Economie et Management (CREM) proposent de faire découvrir puis de tester avec les publics des outils de vote à utiliser pour organiser un collectif, choisir des films ou des repas entre ami·e·s ou encore répartir un budget participatif.
Ils leur demandent, en fin d’atelier, de contribuer à leurs recherches en réfléchissant ensemble à des moyens pour développer la participation aux budgets participatifs proposés par des acteurs publics ou associatifs (collectivités territoriales, Universités, associations...).
Introduction et mise en situation
Vincent présente la thématique sur laquelle il travaille depuis de nombreuses années avec Isabelle et d’autres chercheurs·euses issues de l’Economie du choix social et de l’Informatique.
Il contextualise en passant en revue les nombreux moments où des choix démocratiques sont à faire, du vote à l’Assemblée Nationale à l’élection du président de la République en passant par la désignation de gagnant·e·s d’une épreuve sportive (telle qu’une épreuve de patinage artistique ou de gymnastique) ou d’un concours d’entrée au conservatoire pour des musicien·ne·s.
Puis présente différentes techniques de vote, en remontant au XVIIIème siècle, avec l’opposition entre la méthode de Condorcet et la méthode de Borda.
Enfin, Vincent présente la plateforme de test de modes de scrutin WHALE 5 (Which Alternatives are Elected?), développée par un de ses collègues du Laboratoire d’Informatique de Grenoble (LIG), Sylvain Bouveret. Cette plateforme est disponible en accès libre pour ceux et celles qui souhaiteraient l’utiliser.
Le petit déjeuner démocratique
Afin de mettre les publics au cœur du sujet, est proposé aux participant·e·s de choisir deux ingrédients parmi cinq pour composer le petit déjeuner qui leur sera servi, puis chaque table choisit, le plus justement possible, en se basant sur les votes collectés, la composition du petit déjeuner qui sera servit sur la table d’à côté.
Les cinq ingrédients proposés étaient : du quatre-quart, des bananes, des fruits secs, du fromage et des yaourts aux fruits.
Les préférences de chaque table ont été imprimées sur une feuille puis déposées sur la table d’à côté, qui a choisit, avec ses propres règles improvisées sur le moment, deux ingrédients afin de satisfaire au mieux les préférences exprimées.
Le jeudi, le vote proposé était assez simple, les participant·e·s devaient simplement dire quels aliments ils ou elles aimaient et quels aliments ils ou elles n’aimaient pas. Et presque tous les groupes ont adopté une technique qui consistait à sélectionner pour celles et ceux de la table d’à côté, deux ingrédients de façon à ce que tout le monde ait au moins un ingrédient qu’il aimait.
Le vendredi, l’exercice fut plus complexe, il s’agissait de classer les 5 ingrédients par ordre de préférence. Les choix ont alors été plus animés et les groupes se sont lancés dans des techniques assez complexes.
Tests de différents modes de scrutin sur Whale 5
Trois situations de choix collectifs avec des modes de scrutins différents ont ensuite été testées avec le public sur Whale 5 et différentes règles de votes ont été appliquées à chaque scrutin. Pour la première situation, « Deux choix pour un pique-nique », il s’agissait de choisir, comme pour le petit déjeuner précédemment, deux plats parmi 5.
Les résultats sont affichés à l’écran et des simulations avec les différentes règles de comptabilisation des votes montrent que le couple vainqueur n’est pas le même selon la règle choisie. Par exemple, « Poulet et Gaspacho » gagne avec trois des quatre règles testées mais perd avec la dernière.
Pour le second test, « le dessert préféré des français », il s’agissait d’évaluer chaque dessert à l’aide d’une échelle de 1 à 5. Enfin, pour le dernier test, « Les projets étudiants », il suffisait, pour chaque personne, de sélectionner les projets qui lui plaisaient et d’ignorer ceux qui ne lui plaisaient pas.
Là encore, pour ces deux tests, différentes règles de vote sont appliquées sur les mêmes résultats et ne désignent pas toujours les mêmes « vainqueurs ».
Inspiration : présentation des budgets participatifs de l’Université de Caen et de la Ville de Caen
Désormais conscient que le choix des modes de scrutins et des règles de vote ont une importance primordiale pour effectuer un choix collectif, le public découvre deux exemples de budgets participatifs mis en place sur Caen ces dernières années : celui de l’Université de Caen et celui de la ville de Caen. Théo Lesenechal et Arthur Le Coz, les deux Vice-Présidents étudiants de l’Université de Caen Normandie, présentent le budget participatif de l’Université de Caen.
Un budget participatif pour permettre aux étudiant·e·s d’exprimer leurs attentes, leurs souhaits quant aux aménagements des campus de l’Université. L’initiative est financée sur les fonds de la CVEC (Contribution Vie Etudiante et de Campus), ce qui permet donc aux contributeurs et contributrices (les étudiant·e·s) de décider de l’affectation d’une partie de leurs cotisations à des aménagements qu’elles et ils auront choisis, collectivement.
Et c’est justement la façon dont est effectué ce choix collectif qui est particulièrement intéressant ici.
Le bilan de la troisième édition, dévoilé en direct lors de cet atelier du TURFU Festival, est le suivant : 115 000 euros d’investissements, 26 projets répartis sur les 11 campus universitaires. Un réel succès malgré un taux de participation qui reste faible : 4 % environ (1 320 votant·e·s sur 29 000 étudiant·e·s). Ce faible taux de participation est un taux qu’on retrouve généralement sur les autres expériences de budgets participatifs menées sur le territoire Français, sans qu’on parvienne vraiment à comprendre pourquoi il est si faible.
La communication sur les budgets participatifs n’est-elle pas bonne ? Le principe même de budget participatif est-il trop flou pour la plupart des français·e·s ? Les modalités de scrutins où les règles de vote sont-elles inadaptées ? La nature des projets éligibles est-elle trop restrictive ? … Autant de questions que l’on retrouve en examinant le bilan du budget participatif de la Ville de Caen, dont le fonctionnement est très s
Co-prototypage d'un questionnaire concernant les budgets participatifs
Après avoir découvert les différents modes de scrutin et règles de vote, après les avoir testés, manipulés, examinés, après avoir découvert deux exemples de budgets participatifs concrets, les participant·e·s de sont maintenant appelé·e·s à contribuer aux travaux des chercheurs et chercheuses qui animent cet atelier en prototypant un questionnaire qui aura vocation à mieux comprendre pourquoi les français·e·s ne se mobilisent pas lorsqu’on leur offre l’occasion de choisir des investissements collectifs de proximité qui pourraient pourtant leur être pratiques ou agréables au quotidien.
En somme : comment rendre ces budgets participatifs plus compréhensibles, plus attractifs, plus intéressants auprès du grand public ? Chaque groupe se met au travail….
Les co-productions du jeudi : du fun et de la proximité !
Lors du premier atelier, celui du jeudi, les publics ont surtout exploré la piste du fun et du ludique. Les questionnaires proposés cherchent d'abord à ne pas rebuter les personnes qui seront sondées, le ton des questions est familier, "sans prise de tête", le style quizz a été très utilisé, et de nombreuses questions de proximité ont été glissées (par exemple, pour sonder des caennais·e·s, plusieurs questions portant sur des lieux emblématiques de la ville ou des artistes locaux ont été posées), des dessins ont été ajoutés...
Et des canaux de diffusion de proximité pour ces questionnaires ont été plébiscités (Mairie, École, boîte aux lettres, local associatif...).
Lors de ces restitutions, le terme même de "budget participatif" a été remis en cause, jugé trop repoussant ("j'ai toujours détesté la comptabilité, je ne vais aller spontanément sur un dispositif qui me parle de budget ! Ca me donne des boutons").
Enfin, les publics ont aussi mis l'accent sur l'aspect données privées et ont conseillé de ne pas demander d'informations personnelles trop précises sur les questionnaires.
Les co-productions du jeudi : du sens et du politique !
Lors du second atelier, les publics ont mis en avant de nombreux éléments similaires à ceux de la veille sur la proximité, les canaux de diffusion et la tonalité ludique des questionnaires mais l'accent a été plus particulièrement mis sur la dimension politique des budgets participatifs.
Les participant·e·s ont, par leurs questions, souhaitez en savoir plus sur le rapport au politique et à la démocratie des personnes sondées : "Avez-vous déjà voté ?", "Sur une échelle de 1 à 10, quel est votre degré de confiance dans la politique locale ?", "vous tenez-vous au courant de ce qui se fait dans votre quartier ? dans votre ville ?", "souhaitez-vous êtes sondé·e·s durant le mandat ? et si oui, de quelle façon ?"...
Un autre apport marquant de cette deuxième matinée a été de demander aux sondé·e·s sur quels thèmes ils ou elles aimeraient être consulté·e·s : les investissements à visée sociale ? environnementale ? culturelle ? sanitaire ? économique ? ... Laissant entendre que si les gens ne se mobilisent pas c'est peut-être que les choix limités qu'on leur propose ne les intéressent pas tellement.
Enfin, l'organisation d'évènements festifs autour de ces questions (lors de fête de quartier, en marge de concerts en plein air...) a été proposé par deux groupes, ce type de rencontres vivantes donneraient plus de concret aux projets participatifs.
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